Taux de
chômage et de pauvreté élevés. Précarité grandissante. Les conditions
économiques deviennent de plus en plus inquiétantes. Ils n’ont pas de moyens
pour satisfaire leurs besoins de base. Pas de politiques de protection sociale.
Ceux qui ont l’audace de faire des études douchent encore dans la mendicité.
Les gens semblent ne plus compter sur l’état pour résoudre leurs
problèmes. L’individualisme est à un niveau de record. Il n'y a plus d’espoir
pour les jeunes. Si certains décident de quitter le pays pour s’échapper de cet
enfer, une grande partie des jeunes de la ville du Cap-Haitien remettent leur destin
à l’activisme politique.
M KANDIDA, devenu
slogan du moment
En fait, Ils sont plusieurs centaines de jeunes, hommes
et femmes, à manifester le désir de participer dans les prochaines joutes
électorales au poste de député et de maire. Et, ils ne cachent pas cette
vision. Ils en parlent partout : dans les universités, sur les places
publiques, dans les bars et surtout sur les réseaux sociaux. Ils
s’extériorisent dans des phrases toutes simples : « yo m kandida
wi nèg » ; « ou gen kandida deja ? M bezwenw nan bòd
mw » ; « ou pap kandida ? M’ap parèt wi ». Ces
derniers qui se voient déjà les prochains élus de la ville du Cap-Haitien
s’appuient sur l’élection présidentielle de Joseph M. Martelly en 2010 et les
parlementaires actuels pour justifier que tout est possible dans ce pays.
N’importe qui peut être élu, il suffit d’oser. Rêve, folie, fougue,
détermination s’entrecroisent autour d’un projet de réussite particulière.
A priori, l’irruption des jeunes dans la vie politique
serait une bonne nouvelle pour la démocratie puisqu’elle pourrait contribuer à
vivifier le pluralisme politique dans la deuxième ville du pays. C’est aussi
une opportunité pour ces jeunes de décider de la qualité des politiques à
mettre en place pour pallier les conditions sociales et économiques dégradantes
dans lesquelles ils vivent et prendre en main leur destin dans ce pays. Cela
constituerait en même temps une démarche citoyenne pouvant faire passer les
revendications de cette catégorie jetée dans l’oubliette depuis bien des temps.
Ce serait également une réponse stratégique aux mauvaises gouvernances des élus
qui utilisent les votes populaires à des intérêts personnels.
Cependant, si en partant de cette initiative qui, semble
t-il, est louable et déterminante pour apporter des changements ; plus
loin, il semble pouvoir empirer la situation. En effet, ces jeunes qui décident
d’intégrer le champ politique n’ont aucun motif d’œuvrer pour le bien commun.
Chacun y voit plutôt une porte de sortie. Ils conçoivent la politique comme une
source économique sûre. Ces derniers veulent être élus pour jouir les
privilèges du pouvoir, gagner leur vie et par conséquent maintenir le statu
quo. D’ailleurs, le motif principal qui les anime à faire de la
politique : c’est de changer leurs conditions de vie personnelle. C’est
pourquoi, au lieu de faire front commun pour choisir un candidat devant
défendre les intérêts communs des jeunes, chacun cherche à prendre le devant.
Et, c’est à ça qu’ils devraient leur échec sur la scène politique.
Toutefois, il est possible de transformer ces énergies en
opportunités visant de véritables changements pour les jeunes de cette ville
vivant dans des conditions humiliantes. L’idée serait avant tout que le bien
collectif soit primé sur la simple envie de réussir sa vie. Faut-il que les
jeunes se mettent d’accord sur un cahier de doléances qu’ils s’apprêtent à
défendre à travers un jeune leader reflétant leurs aspirations. Mais surtout,
il est impératif que ces derniers s’organisent autour d’une même vision.
Ainsi, « m kandida » deviendrait « nou
kandida »
BELL RICHEMOND
Étudiant finissant en science politique à l'UEH-Limonade
Président du comité Central de L'ESUTH - UPNCH
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